Une des clés de l’attractivité du RN pour vous, c’est le « producérisme » au cœur de son imaginaire. En France, le mot est totalement inconnu. Comment le définissez-vous ?
C’est une autre forme de lutte des classes, qui n’est pas fondée sur l’opposition structurelle du capital et du travail comme chez Marx. Elle est conçue d’un point de vue essentiellement moral et oppose deux catégories.
D’un côté, vous trouvez les producteurs, qui peuvent être des salariés, des indépendants ou des patrons, mais qui se caractérisent par leur vertu, c’est-à-dire par le fait que ce sont des gens qui bossent dur et qui n’aspirent pas à autre chose que vivre du fruit de leur labeur. De l’autre, vous trouvez des parasites qui pompent indûment les fruits de ce travail. Ils sont représentés comme des fainéants, des oisifs, des gens qui ne produisent rien ou en tout cas rien d’utile.
L’autre dimension importante du producérisme, c’est qu’il suppose l’existence de parasites d’en haut et de parasites d’en bas. Les premiers ne produisent pas, mais ils vivent de la circulation des capitaux. Lorsqu’il s’agit du capital économique, ce sont des usuriers et des spéculateurs. Lorsqu’il s’agit du capital culturel, il s’agit de fabricants de théories spécieuses, accusés de faire main basse sur les médias et l’enseignement. Les parasites d’en bas, eux, sont dans la redistribution des revenus et des droits. Il s’agit des assistés, qui vivent de la charité publique ou privée.
La dernière caractéristique cruciale du producérisme, c’est l’idée, plus ou moins explicite, qu’au fond les producteurs sont « les gars de chez nous ». Leur vertu, leur volonté de ne vivre que du produit de leur labeur, viendrait de la culture native nationale. Alors que les parasites seraient toujours, sinon étrangers de fait, du moins toujours étrangers à la culture du pays. Ceux qui sont dans la spéculation financière ou intellectuelle évoluent dans le monde cosmopolite des intellectuels ou bien dans le monde occulte de la finance internationale ; quant aux assistés, ce sont souvent des immigrés, des étrangers ou des gens étiquetés d’origine allogène.
Un autre article avec le même auteur : « Avec le RN, les gens s’entendent dire que les choses vont s’améliorer sans qu’ils n’aient rien à changer »
https://www.mediapart.fr/journal/politique/070924/avec-le-rn-les-gens-s-entendent-dire-que-les-choses-vont-s-ameliorer-sans-qu-ils-n-aient-rien-changer
Une des clés de l’attractivité du RN pour vous, c’est le « producérisme » au cœur de son imaginaire. En France, le mot est totalement inconnu. Comment le définissez-vous ?
C’est une autre forme de lutte des classes, qui n’est pas fondée sur l’opposition structurelle du capital et du travail comme chez Marx. Elle est conçue d’un point de vue essentiellement moral et oppose deux catégories.
D’un côté, vous trouvez les producteurs, qui peuvent être des salariés, des indépendants ou des patrons, mais qui se caractérisent par leur vertu, c’est-à-dire par le fait que ce sont des gens qui bossent dur et qui n’aspirent pas à autre chose que vivre du fruit de leur labeur. De l’autre, vous trouvez des parasites qui pompent indûment les fruits de ce travail. Ils sont représentés comme des fainéants, des oisifs, des gens qui ne produisent rien ou en tout cas rien d’utile.
L’autre dimension importante du producérisme, c’est qu’il suppose l’existence de parasites d’en haut et de parasites d’en bas. Les premiers ne produisent pas, mais ils vivent de la circulation des capitaux. Lorsqu’il s’agit du capital économique, ce sont des usuriers et des spéculateurs. Lorsqu’il s’agit du capital culturel, il s’agit de fabricants de théories spécieuses, accusés de faire main basse sur les médias et l’enseignement. Les parasites d’en bas, eux, sont dans la redistribution des revenus et des droits. Il s’agit des assistés, qui vivent de la charité publique ou privée.
La dernière caractéristique cruciale du producérisme, c’est l’idée, plus ou moins explicite, qu’au fond les producteurs sont « les gars de chez nous ». Leur vertu, leur volonté de ne vivre que du produit de leur labeur, viendrait de la culture native nationale. Alors que les parasites seraient toujours, sinon étrangers de fait, du moins toujours étrangers à la culture du pays. Ceux qui sont dans la spéculation financière ou intellectuelle évoluent dans le monde cosmopolite des intellectuels ou bien dans le monde occulte de la finance internationale ; quant aux assistés, ce sont souvent des immigrés, des étrangers ou des gens étiquetés d’origine allogène.